La proximité géographique ou la préférence locale sont de plus en plus invoquées dans les appels d’offres de marchés publics. Derrière ces critères se cachent en fait deux ambitions : aider les PME locales qui postulent aux marchés publics locaux et favoriser l’achat dit « durable » plus respectueux de l’environnement.
Le Code des Marchés publics est strict en la matière
En période de crise économique et de chômage élevé la tentation est grande d’utiliser les marchés publics pour tenter de favoriser les entreprises locales situées à proximité de l’organisme acheteur et d’inclure par exemple, dans l’appel d’offres, une clause qui acterait la préférence locale, au détriment de toutes les autres entreprises nationales ou internationales implantées dans d’autres régions.
Cependant, la proximité géographique peut-elle entrer dans la liste des critères de choix lors d’un appel d’offres ?
Si une telle motivation a du sens du point de vue des donneurs d’ordre locaux elle s’oppose avec le Code des Marchés Publics qui est absolument clair sur le sujet : il est interdit de retenir parmi les critères de choix celui de l’implantation géographique et de réserver ainsi les marchés publics aux entreprises ayant leur siège social dans la région. Une telle pondération serait considérée comme discriminatoire.
Récemment Gérard Bailly, sénateur du Jura, évoquait le paradoxe entre ce principe communautaire et la nécessité invoquée par le Grenelle de l’Environnement de « rendre plus visibles les actes et achats écoresponsables ».
Des objectifs de développement durable sont effectivement bien inscrits dans le droit de la commande publique depuis 2006 mais selon le ministère de l’Economie, ce critère doit être en adéquation avec l’objet du marché et si une entité publique décide d’éliminer un candidat pour cause géographique, cela ne peut être que parce que cet éloignement rend l’offre économiquement moins avantageuse ou augmente les délais de réalisation.
Attention au délit de favoritisme !
La Cour de Cassation a récemment émis un arrêt rappelant que l’attribution d’un marché selon le principe de « préférence locale » est considérée comme un délit de favoritisme, ce qui est strictement interdit.
L’affaire remonte à janvier dernier, lorsqu’un maire s’est vu condamner pour délit de favoritisme.
Le maire avait choisi, dans le cadre d’un marché publics pour l’impression de flyers en N&B, une entreprise locale sur la base de l’offre économiquement la plus avantageuse. Par la suite il avait décidé d’imprimer ses flyers en quadrichromie, un changement qui entrainait une augmentation de coût pour lequel l’entreprise concurrente non-sélectionnée aurait en fait été la « moins-disante ». Cependant le maire avait laissé le marché à l’imprimeur local initialement retenu.
Les juges de la Cour de Cassation de Lyon ont considéré que le maire avait donné à l’imprimeur local un avantage injustifié du fait de sa proximité géographique et qu’il y avait donc eu inégalité entre les deux candidats.
A un niveau plus large, des voix s’élèvent pour réclamer la préférence nationale telle que l’appliquent les Etats-Unis par exemple, favorisant ainsi leur industrie lors des marchés publics. Un principe jusqu’à présent interdit au niveau européen du fait du principe de « non-discrimination ».
Une refonte du Code des Marchés Publics est à l’étude ; le sujet de la préférence géographique y sera-t-il abordé ?
– Pour en savoir plus sur la réforme du Code des Marchés Publics, consultez l’article sur le nouveau code des marchés publics sur France Marchés.
– Découvrir l’arrêt de la Cour de Cassation du 22 janvier 2014.